Parlons de la Grande Caraïbe • Dépassons cette image de carte postale bien connue
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Gerty Archimède fait partie des grandes figures de la Guadeloupe. Première avocate des Antilles françaises, militante féministe, élue locale, députée, passionnée de justice sociale, elle a laissé une empreinte durable dans l’histoire de l’archipel.
Née le 26 avril 1909 à Morne-à-l’Eau, elle est l’aînée de cinq enfants. Sa mère est téléphoniste et son père, ancien boulanger, deviendra conseiller général de 1910 à 1945 et maire de Morne-à-l’Eau de 1912 à 1947.
Après son baccalauréat en philosophie, elle travaille dans une banque en Guadeloupe pour financer ses études de droit. Elle étudie d’abord en Martinique, puis à la Sorbonne, où elle obtient sa licence.
À 30 ans, elle prête serment devant la cour d’appel de Basse-Terre, devenant la première avocate des Antilles françaises en décembre 1939.
En octobre 1945, lors du premier scrutin ouvert aux femmes, elle est élue conseillère générale sur la liste d’entente prolétarienne socialo-communiste.
Elle devient députée lors des législatives de novembre 1946, au sein de la première mandature de la 4e République. Elle est l’une des premières femmes députées françaises, juste après Eugénie Eboué-Tell.
À l’Assemblée nationale, elle siège à la Commission de la justice et de la législation ainsi qu’à la Commission des territoires d’outre-mer. Elle est aussi nommée juge-suppléante à la Haute Cour de justice.
Elle adhère au Parti communiste français en 1948, après avoir étudié son fonctionnement et sa doctrine. Le PCF l’envoie représenter le parti lors de nombreuses conférences internationales. Elle y restera fidèle jusqu’à sa mort.
En 1953, elle fonde la fédération guadeloupéenne de l’Union des Femmes Françaises, qui deviendra l’Union des Femmes Guadeloupéennes. Ses combats pour les droits des femmes marquent durablement la société guadeloupéenne.
Engagée dans la vie municipale, elle est conseillère de 1947 à 1952, puis adjointe au maire jusqu’en 1955. En 1956, les communistes remportent la mairie et elle devient maire, en remplacement d’Élie Chaufrein. Son élection sera invalidée la même année.
Attachée à la défense du patrimoine culturel, elle contribue en 1957 à la création de l’Académie de Créole Antillais (ACRA). Parmi les 26 membres fondateurs, seules quatre femmes, dont elle.
Lors de ses séjours à Cuba entre 1964 et 1965, elle aurait rencontré Ernesto « Che » Guevara.
Elle occupe les fonctions de bâtonnière de l’Ordre des avocats de Guadeloupe de 1967 à 1970.
En 1969, elle défend Angela Davis, alors bloquée en Guadeloupe avec ses camarades après la confiscation de leurs livres et de leurs passeports par la douane française. Son intervention fait le tour du monde. Angela Davis dira plus tard à quel point elle a été impressionnée par cette avocate « au courage indomptable ».
« Maître Archimède était une grande femme à la peau sombre, aux yeux vifs et au courage indomptable. Je n’oublierai jamais notre première rencontre. Je sentis que j’étais en présence d’une très grande dame. Pas un instant je ne doutai qu’elle allait nous sortir de notre mauvaise posture. Mais j’étais tellement impressionnée par sa personnalité, le respect qu’elle attirait à elle en tant que communiste, même de la part des colonialistes que, pendant un certain temps, notre problème me parut secondaire. Si je n’avais écouté que mes désirs, je serais restée sur l’île pour tout apprendre de cette femme. » – Extrait de l’Autobiographie d’Angela Davis (Albin Michel, 1975)
Gerty Archimède préside cette année-là le 7e congrès du Parti communiste guadeloupéen.
Elle décède à Basse-Terre le 15 août 1980, à l’âge de 71 ans. Son héritage politique, social et culturel demeure puissant.