Je suis membre de GuadeloupeTech, cluster de l’économie numérique de la Guadeloupe, depuis plusieurs années. J’ai rejoint cette association, parce que j’étais blogueuse, je voulais créer d’autres supports web, j’avais plusieurs clients dans ce secteur. Il m’apparaissait normal de contribuer au développement du numérique en Guadeloupe.
Entre GuadeloupeTech et moi, il y a eu beaucoup de hauts et de bas. La vie associative… Beaucoup d’heures données bénévolement dans le cadre de projets, de multiples réunions et d’événements de toutes sortes. Cela m’a apporté sans nul doute des compétences, des connaissances, un réseau élargi et la satisfaction du devoir accompli. Cependant, il a également fallu faire avec les tensions, incompréhensions, déceptions induites par le travail en équipe, une fatigue accumulée, une lassitude liée au constat d’un piétinement concernant l’avancée de certains projets portés par le cluster et qui me tenaient à cœur… Voici mon (court) bilan.
Je vous raconte cela parce que j’ai demandé à une autre membre de GuadeloupeTech de jouer le jeu du pré-bilan : Betty Fausta, présidente de l’association depuis 2016, membre fondateur en 2013 et acteur de l’économie numérique ayant oeuvré pour une fédération de nos filières depuis 2006. Il lui reste encore une année à effectuer pour boucler son mandat en cours et elle a d’ores et déjà annoncé qu’elle ne se représentera pas.
« Lorsque je m’engage, je sais que le fais pour construire le présent et le futur, mais aussi qu’un jour, il sera temps de passer la main. Il faut savoir tourner une page, tout en accompagnant ceux qui arrivent. La présidence de GuadeloupeTech est une fierté pour moi, elle permet de détenir un pouvoir réel, mais cela prend du temps, de l’énergie. »
Lors de l’assemblée générale de GuadeloupeTech qui s’est tenue il y a quelques jours, nous avons eu droit à une présidente plus déterminée et dynamique que jamais. Cela m’a d’autant plus donné envie d’en savoir plus sur ses ambitions passées, présentes et bien sûr futures. Interview.
« J’ai voulu devenir présidente, car je voulais apporter une vraie force de construction pour une Guadeloupe où l’économie numérique serait pourvoyeuse d’emplois à sa jeunesse, mais plus généralement toutes les personnes de bonne volonté. J’étais persuadée qu’il fallait accompagner l’écosystème tech, faire en sorte qu’il se renforce, en favorisant les rencontres entre acteurs. Sans celles-ci, il ne pouvait y avoir de collaboration, de construction possible, et donc de forte création ajoutée. »
« J’avais donc une démarche de construction d’une Guadeloupe nouvelle où l’économie numérique aurait une place plus forte, autant que celle du BTP, parce que les économistes sont clairs : pour un euro investi dans le numérique, sept euros sont produits en valeur ajoutée. »
2016 –> 2021
« Lorsque j’ai pris la présidence du cluster en 2016, celui-ci comptait une quarantaine de membres et était assez moribond. Nous avions très peu de visibilité, peu d’interactions avec les autres branches de l’économie guadeloupéenne. »
« L’association compte aujourd’hui 205 membres, dont 9 associations membres associés et une collectivité. Chaque mois, nous gagnons cinq adhérents en moyenne. Cela veut dire que le travail se poursuit. »
« Je suis heureuse aussi que nous ayons pu mettre en place plusieurs programmes d’accompagnement des entrepreneurs de la tech pour qu’ils soient mieux structurés, protègent leur propriété intellectuelle, puissent mieux défendre leurs intérêts, soient accompagnés concernant leur stratégie commerciale. Nous travaillons avec plusieurs partenaires pour ce faire.
En terme de structuration, grâce aux cotisations de nos membres et des financements de nos partenaires, nous allons pouvoir engager deux permanents : un chef de projet et un animateur de communautés. Nous allons également bientôt ouvrir notre espace à Jarry qui nous permettra de recevoir nos membres et d’organiser des événements tech.
Nous avons réussi à bouger les lignes, parce qu’avant nous, les délégations de la Guadeloupe à l’international pour des événements tech n’existaient pas. Nous avons enchaîné les missions au Québec, en Europe. »
Le label French Tech enfin…
« Nous avons travaillé pendant plus de deux ans pour obtenir ce label French Tech. Nous avons même eu une écoute de l’Élysée, qui avait compris tout son intérêt pour la Guadeloupe. Nous l’avons finalement obtenu en 2020 et à la clef, des projets et des fonds pour pouvoir mieux dynamiser l’innovation et la structuration des startups.
Nous avons constitué un bureau d’administration le plus large possible, ouvert aux personnes de bonne volonté de la tech, mais pas uniquement. En effet, dans la French Tech, on doit travailler sur l’innovation sous toutes ses formes, ce qui fournit l’occasion de collaborer avec d’autres filières et d’élaborer les beaux projets, produits, qui nous font tant défaut pour créer les milliers d’emplois dont nous avons tant besoin. »
2021, année pleine de promesses
« Nous voulons renforcer le programme d’accompagnement de nos membres, le mentorat. Notre objectif est que nos entrepreneurs ne se sentent plus seuls, qu’ils soient soutenus à rythme régulier, fort, par des experts locaux et internationaux. Nous expérimentons avec le programme d’accompagnement REVIGUATECH doté de plus de 62 000 euros. »
« Notre tiers-lieu deviendra un hub d’innovation, avec nos actions, mais aussi avec celles qui nous seront proposées. Nous attendons les suggestions d’associations partenaires, afin de renforcer la cohérence de la stratégie que nous avons établie pour les deux prochaines années. »
« Nous allons développer les missions de prospection internationale. Nous avons les moyens d’attirer des entreprises en Guadeloupe, comme le font des pays tels que Saint-Domingue. Par contre, nous devons renforcer la capacité de travail de nos jeunes professionnels, le fait qu’ils puissent répondre aux standards internationaux. Ils doivent se rendre compte que le monde ne les attend pas et que, si cela continue, nous serons décrochés ! Il y a donc un travail d’empowerment – et pas uniquement féminin – à effectuer.
Nous avons des talents internationaux et devons avoir les moyens de les payer. Il nous faut renforcer la capacité de nos entreprises locales à avoir plus de projets, de budget, pour faire revenir nos talents chez nous et pouvoir ainsi gagner des parts de marché hors de l’archipel.»