Flashback Caraïbe : la coiffure, un secteur vecteur d’emplois, mais fragilisé, en Guadeloupe

Secteur majeur de l’artisanat, la coiffure est confrontée à des problématiques fortes :  manque de formation de certains coiffeurs, importance de l’activité informelle, poids des charges sociales. Etat des lieux avec Anne Négrit-Quellery, présidente de la Fédération Nationale de la Coiffure (FNC) de la Guadeloupe depuis mars 2013. 

Anne Négrit-Quellery : J’ai été élue présidente pour réunir tous les coiffeurs de l’archipel et faire en sorte que nous parlions d’une seule voix. Je communique beaucoup avec les collègues. Je fais le tour des salons. Dès que je note qu’un salon vient de s’installer, je vais me présenter, ce qui instaure une convivialité avec tous. Je demande aux coiffeurs de venir à la fédération, car quand nous serons tous ensemble, nous pourrons faire des choses formidables. 

Mylène Colmar : La FNC de la Guadeloupe compte 40 membres. Un chiffre peu élevé. Comment l’expliquez-vous ? 

A.N.-Q. : Nous devrions être plus, mais il nous faut encore faire comprendre aux professionnels du secteur l’intérêt de se rassembler. Chacun a ses idées, mais si nous les mettons toutes ensemble, si nous nous fédérons, nous pourrons grandir et évoluer. 

M.C. : Quelles sont les grandes caractéristiques du secteur de la coiffure en Guadeloupe ? 

A.N.-Q. : En Guadeloupe, il y a plus de 550 coiffeurs officiellement installés. Cependant, beaucoup de personnes travaillent « au noir ». Certains mettent leur entreprise en sommeil, mais continuent à travailler. Les contrôles ne sont ni réguliers, ni suffisants. Ce n’est pas à la fédération de « faire la chasse », c’est le devoir de l’Etat. Il faut savoir que les coiffeurs utilisent des produits chimiques, les clients peuvent avoir des soucis. L’Etat doit prendre ses responsabilités, vérifier que les coiffeurs aient bien leur diplôme et soient installés convenablement, selon les normes. 

M.C. : Pourquoi le travail informel est-il si développé dans votre secteur ? 

A.N.-Q. : Pour les entreprises, les charges à payer sont très importantes. Quand vous avez une employée, vous devez verser plus de 1300 euros par trimestre à la Sécurité sociale. Beaucoup de coiffeurs n’emploient pas à cause de cela et préfèrent travailler seul dans leur salon. Et parfois, ils n’ont pas suffisamment de clientèle, à cause du travail au noir justement. Parfois même, certains employés peuvent travailler chez vous et tenir un salon (ndlr : informel) chez eux, avec leur propre clientèle. Cela aussi nous occasionne un manque à gagner. Voilà pourquoi nous disons aux coiffeurs : venez à la fédération avec vos employés pour que nous puissons vous informer. 

M.C. : Quelles sont les actions majeures menées par la fédération ?  

A.N.-Q. : Outre l’information, nous faisons de la formation sur de multiples sujets : les risques chimiques (en collaboration avec la Sécurité sociale), les nouveaux produits, le développement personnel, la confiance en soi dans l’entreprises. Nous organisons des événements, des shows, pour montrer que nous sommes des créateurs, mais aussi des voyages pour aller échanger avec d’autres professionnels. Avec les présidents des fédérations de la Martinique, de la Guyane, de la Réunion, nous nous concertons pour faire les choses ensemble. 

M.C. : Quelles sont vos satisfactions en tant que présidente de fédération ? 

A.N.-Q. : Je suis très satisfaite parce que la communication se passe très bien avec les coiffeurs qui apprécient les actions menées. Je m’efforce d’être très présente, d’organiser régulièrement des réunions du bureau de la fédération. Je remplis ma mission qui est de défendre la fédération, les coiffeurs, d’informer – notamment en allant sur les ondes – sur la coiffure et d’expliquer aux gens que le coiffeur est important, car l’apparence, la présentation compte beaucoup. J’encourage mes collègues à faire les choses bien. Je suis là pour « booster » tout le monde. 

M.C. : Quels sont vos objectifs ? 

A.N.-Q. : Je vais inciter les coiffeur à se former, car quand on a des diplômes, la vie est plus facile. Même s’ils n’ont pas leur BP, il y a la validation des acquis de l’expérience. Il ne faut pas qu’ils hésitent à suivre des formations. Certains se disent : si je laisse mon salon pendant deux, trois heures, une semaine, pour aller me former, je perdrai des clients. Je leur réponds non ! Quand vous fermez votre salon pour suivre une formation, c’est comme si vous avez déjà gagné 15, 20 clients, parce que vous allez apprendre à maîtriser des choses, vous pourrez donner de bonnes informations à votre clientèle, répondre à ses questions. Et je m’emploierai à les convaincre de rejoindre la fédération, pour que nous puissions défendre les coiffeurs en Guadeloupe.  

Interview parue dans le magazine Artisanat Guadeloupe, numéro 2 sorti en août 2014.

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