Je suis Mylène Colmar. Journaliste, consultante éditoriale et éditrice en Guadeloupe, j’ai créé ce blog en 2015 pour raconter ma région, ses acteurs et enjeux.

Grande Caraïbe et cryptomonnaie : un territoire idéal et sous tension
La Grande Caraïbe est devenue l’un des terrains les plus dynamiques du monde pour les cryptomonnaies. Ce n’est pas un hasard. La région cumule trois réalités : une diaspora très active, des coûts de transfert d’argent élevés et des systèmes bancaires parfois fragiles ou limités. Le cocktail parfait pour pousser les populations et les entreprises vers des solutions alternatives comme les cryptos.
En parallèle, les États sont sous pression. Les risques de blanchiment, de trafics transfrontaliers et d’évasion fiscale sont réels, surtout dans une zone éclatée entre micro-États, territoires dépendants et grandes économies comme le Mexique ou la Colombie, d’où le virage réglementaire initié ces dernières années.
Les pionniers régionaux
- Bahamas : le premier CBDC du monde
Les Bahamas ont lancé en 2020 le Sand Dollar, première monnaie numérique de banque centrale opérationnelle. Objectif : faciliter les paiements, réduire les coûts, inclure les populations éloignées des banques et suivre plus efficacement les flux.
- Caraïbe orientale : DCash en expérimentation
La Eastern Caribbean Central Bank a créé DCash, utilisé par 8 territoires (Saint-Lucie, Dominica, Antigua-et-Barbuda…). Le système a connu une panne en 2022, ce qui a rappelé la fragilité des infrastructures numériques, mais les tests se poursuivent.
- Cuba, Venezuela, Haïti : crypto par nécessité
Ces pays vivent une inflation forte, des sanctions ou des pénuries bancaires. Le recours au bitcoin et à l’USDT y est massif au quotidien, pour les transferts, les achats et le marché noir du dollar. Le Venezuela a tenté le Petro, sans succès.
Une poussée technologique dans les économies intermédiaires
- Mexique : explosion des plateformes d’échange, boom du paiement crypto dans certaines chaînes.
- Colombie : l’un des marchés les plus crypto-actifs d’Amérique latine.
- Costa Rica : un climat réglementaire plus ouvert, avec des entreprises qui paient déjà une partie des salaires en crypto.
- Panama : volonté d’attirer les fintech et d’assouplir l’usage des cryptos dans les paiements et contrats (en débat depuis 2024). Le pays vient d’ailleurs de renforcer la transparence fiscale avec deux accords internationaux sur l’échange d’informations, incluant les cryptoactifs.
4 enjeux pour la région d’ici 2030
- Régulation souple, mais ferme
La Grande Caraïbe doit trouver un équilibre : encourager l’innovation sans devenir un refuge pour les flux illégaux. Les pressions du GAFI et des États-Unis vont continuer à peser lourd.
- Inclusion financière
Les cryptos peuvent réduire les coûts de transfert, améliorer l’accès au paiement numérique et soutenir les petites économies insulaires. C’est un potentiel immense, à condition de protéger les utilisateurs.
- Souveraineté monétaire
Les CBDC (monnaies numériques de banque centrale) vont se multiplier. Elles deviendront l’outil privilégié pour sécuriser les transactions et réduire la dépendance au dollar numérique non régulé.
- Attractivité économique
Plusieurs territoires veulent devenir des hubs fintech (Bahamas, Panama, Curaçao, Barbade). Les avantages fiscaux et l’anglais comme langue de travail jouent clairement en leur faveur.
La région avance vite, parfois trop vite, avec des États aux capacités technologiques très inégales. Les cryptos ne remplaceront pas les monnaies nationales, elles s’imposent plutôt comme un réflexe parallèle : outil de survie dans certains pays, levier d’innovation dans d’autres.







