La Grande Caraïbe en manque de bras : les métiers vraiment en tension

Le chômage revient souvent dans les débats caribéens. La pénurie de main-d’œuvre beaucoup moins. Pourtant, sur le terrain, le constat est limpide : plusieurs secteurs clés peinent à recruter, parfois depuis des années. Le problème ne tient pas à l’absence de population active. Le problème tient au décalage entre les compétences disponibles, les formations proposées et les besoins réels des économies locales.

Tourisme et hôtellerie : un pilier fragilisé

Le tourisme reste central dans de nombreux territoires, des Bahamas à la Jamaïque, de Sainte-Lucie à Aruba. Hôtels, restaurants, croisières, activités de loisirs recrutent en continu. Les postes les plus recherchés restent les moins valorisés : personnel d’étage, serveurs, cuisiniers, agents d’accueil, guides.
La saisonnalité, les salaires jugés insuffisants et des conditions de travail exigeantes découragent durablement. Résultat : un secteur vital qui fonctionne souvent avec des équipes réduites, parfois complétées par une main-d’œuvre venue d’ailleurs.

Construction et infrastructures : une pénurie structurelle

Hôtels, routes, ports, logements, équipements publics. Les chantiers se multiplient dans toute la région. Les profils recherchés sont connus : maçons qualifiés, électriciens, plombiers, chefs de chantier, ingénieurs BTP.
La formation locale peine à suivre le rythme. Beaucoup de jeunes se détournent de ces métiers manuels, perçus comme pénibles ou peu valorisés, alors qu’ils offrent des débouchés concrets et une certaine stabilité.

Santé : une tension permanente

Le manque de personnel de santé constitue un problème majeur. Médecins, infirmiers, aides-soignants, sages-femmes, techniciens médicaux font défaut dans de nombreux territoires.
La fuite des compétences vers l’Amérique du Nord ou l’Europe accentue la fragilité des systèmes de santé locaux, qui forment puis perdent leurs professionnels. La situation devient critique dans les îles où le vieillissement de la population s’accélère.

Numérique et compétences techniques : un retard coûteux

La transformation numérique progresse dans la région : e-administration, fintech, cybersécurité, e-commerce, data. Les besoins sont bien identifiés. Les compétences restent rares.
Développeurs, techniciens réseaux, spécialistes IT, ingénieurs en énergie ou en environnement manquent cruellement. Des projets sont ralentis, parfois abandonnés. Ce déficit freine la diversification économique portée notamment par la CARICOM et la Banque mondiale.

Agriculture, énergie, environnement : des métiers stratégiques sous-estimés

Autonomie alimentaire, transition énergétique, adaptation au changement climatique occupent une place centrale dans les discours. Sur le terrain, le manque de profils formés saute aux yeux : agriculteurs qualifiés, techniciens agricoles, spécialistes des énergies renouvelables, experts en gestion des risques climatiques.
Ces métiers conditionnent l’avenir de la région. Leur attractivité reste faible, faute de formations modernes, de reconnaissance sociale et de perspectives économiques lisibles.