À la fois partenaire politique, économique et humanitaire, le Canada joue depuis plusieurs décennies un rôle singulier dans la Grande Caraïbe, une région longtemps perçue comme le domaine réservé des États-Unis et de l’Europe.
Une diplomatie de proximité
Membre observateur de la CARICOM et de l’Association des États de la Caraïbe (AEC), le Canada s’efforce depuis les années 1990 de tisser une coopération équilibrée avec ses voisins du Sud.
Son approche : la concertation et la stabilité. À travers Affaires mondiales Canada et la Banque caribéenne de développement, Ottawa finance des programmes de gouvernance, de formation et d’adaptation au changement climatique.
Le pays dispose d’ambassades à La Barbade, en Jamaïque, à Cuba, en République dominicaine et à Haïti, ainsi que de hauts-commissariats couvrant l’ensemble de la zone anglophone. Cette présence diplomatique dense traduit une volonté claire : rester un partenaire fiable, loin des logiques d’ingérence.
Des échanges économiques ciblés
Sur le plan économique, le Canada n’est pas un géant du commerce caribéen, mais il occupe une niche stratégique. Il importe du rhum, du sucre, des produits de la mer, et exporte en retour des machines, des engrais et des produits pharmaceutiques.
Les compagnies minières canadiennes – Barrick Gold, Newmont, IAMGOLD, entre autres – sont en revanche très présentes. On les retrouve en République dominicaine (mine de Pueblo Viejo), au Guyana et au Suriname, où elles exploitent des ressources en or et en bauxite.
Dans le secteur de l’énergie, des entreprises comme CGX Energy participent à l’exploration pétrolière du bassin guyanais, tandis que des partenariats émergent sur la transition énergétique (géothermie, hydroélectricité, solaire).
Le climat, priorité partagée
Régulièrement frappée par les ouragans, la Caraïbe est au cœur des programmes de coopération climatique du Canada. Ottawa soutient la Caribbean Disaster Emergency Management Agency (CDEMA) et finance des projets de résilience face aux catastrophes naturelles.
En 2023, le gouvernement canadien a annoncé une enveloppe de 44 millions de dollars canadiens pour renforcer la sécurité alimentaire et énergétique des États caribéens.
Une aide précieuse pour des économies souvent vulnérables, mais aussi un geste politique : le Canada se positionne comme allié climatique des petites nations insulaires.
Une diaspora vivante et influente
La force du lien canado-caribéen, c’est aussi sa dimension humaine. Plus d’un million de Canadiens sont d’origine caribéenne, principalement installés à Toronto, Montréal et Vancouver. Cette diaspora active contribue à faire rayonner la culture caribéenne au Nord, notamment à travers le célèbre Caribana de Toronto, l’un des plus grands carnavals caribéens hors de la région.
Elle agit aussi comme relais économique et diplomatique, favorisant les échanges, les transferts financiers et les initiatives culturelles.
Haïti, dossier sensible
C’est sans doute à Haïti que la présence canadienne est la plus visible – et la plus controversée.Ottawa participe depuis longtemps aux efforts internationaux pour stabiliser le pays, en finançant des missions de police, des projets éducatifs et des initiatives de gouvernance. Mais cette implication est parfois critiquée : certains y voient une politique d’assistance perpétuelle plus qu’un vrai partenariat.
Le Canada, conscient du dilemme, cherche désormais à miser sur la société civile et sur la formation de nouvelles élites locales.
Dans un contexte mondial de recomposition géopolitique, la stratégie de soft power nordique du Canada pourrait lui offrir un rôle de plus en plus important dans la Grande Caraïbe – notamment sur les questions de climat, d’énergie et de sécurité régionale.