J’ai choisi de parler du Mercosur pour deux raisons. D’abord, parce qu’il inclut des pays inclus dans la Grande Caraïbe : le Guyana et le Suriname, en tant qu’États associés depuis 2013, ainsi que le Venezuela, membre mais suspendu depuis 2016. Ensuite, parce que l’actualité s’y prête : mercredi 3 septembre 2025, la Commission européenne a validé le texte de l’accord commercial entre l’Union européenne (UE) et les pays latino-américains du Mercosur.
Créé en 1991 par le traité d’Asunción, le Mercosur regroupe aujourd’hui l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay et, depuis 2024, la Bolivie.
L’objectif : construire un marché commun fondé sur la libre circulation des biens, des services et des capitaux. Mais l’intégration demeure incomplète, freinée par des divergences internes et des crises politiques, à commencer par celle du Venezuela.
Pourtant, l’organisation reste un acteur incontournable. Le feu vert de Bruxelles redonne un souffle à des négociations engagées depuis plus de vingt ans avec l’UE. L’accord, encore soumis aux ratifications, suscite espoirs économiques et inquiétudes, notamment autour des questions agricoles et environnementales.
Mercosur et Grande Caraïbe
- Venezuela : membre depuis 2012, suspendu en 2016.
- Guyana : État associé depuis 2013.
- Suriname : État associé depuis 2013.
- Enjeu : intégration commerciale avec l’Amérique du Sud, diversification des partenariats au-delà de la CARICOM.
Pour la Grande Caraïbe, l’enjeu est double. L’intégration du Venezuela, du Guyana et du Suriname au Mercosur démontre la connexion de notre région avec les grands ensembles latino-américains. Et l’accord avec l’UE pourrait influencer directement leurs échanges commerciaux et, par ricochet, les dynamiques caribéennes.
Accord UE–Mercosur : un traité historique ?
Le 3 septembre, la Commission européenne a validé le texte de l’accord commercial entre l’Union européenne (UE) et les pays latino-américains du Mercosur — ou, pour faire court, elle a donné son feu vert à un projet de méga-accord, composé de deux volets :
- Un texte provisoire, l’« Interim Trade Agreement » (iTA), destiné à être appliqué immédiatement dès son adoption par le Conseil et le Parlement européen. Ce volet strictement commercial permettra de supprimer les barrières tarifaires sur des pans entiers des échanges entre l’Europe et le Mercosur.
- L’accord complet, le « EU‑Mercosur Partnership Agreement » (EMPA), qui fusionne une partie politique (dialogue, coopération) et une partie commerciale, mais ne prendra effet qu’après ratification par l’ensemble des États membres de l’UE, bien plus long à obtenir.
Dans les grandes lignes, cet accord veut créer la plus vaste zone de libre-échange au monde, couvrant quelque 700 millions de consommateurs.
- Il prévoit la suppression progressive de 92 à 93 % des tarifs douaniers : par exemple, la France verrait disparaître les droits de douane sur une large gamme de produits Mercosur (viande, sucre, soja…), tandis que le Mercosur abolirait les droits sur environ 91 % des exportations européennes (voitures, produits chimiques, pharmaceutiques, vins, fromages, etc.).
- Il institue des quotas pour certains produits sensibles — comme la viande bovine, le sucre ou la volaille — afin d’encadrer les volumes importés.
- Il inclut des mesures de sauvegarde pour rassurer les agriculteurs européens : mécanismes automatiques d’alerte (si volumes ou prix sont dépassés), fonds de compensation d’environ 1 milliard € par an, et possibilités de suspendre temporairement les accords si les importations nuisent à un marché national.
- Enfin, une batterie de dispositions couvre l’accès aux marchés publics, la protection des indications géographiques (plus de 350 produits européens), les règles d’origine, et des chapitres dédiés à l’agriculture, au développement durable, à la concurrence, aux services, aux investissements et à la propriété intellectuelle.