Chaque année, à l’approche de juillet, les médias locaux, les affiches d’événements et même nos conversations quotidiennes reprennent le même refrain : « l’été arrive », « les vacances d’été », « les activités de l’été ». Et pourtant… dans la Caraïbe, il n’y a pas d’été.
Ce mot, hérité d’un calendrier qui n’est pas le nôtre, n’a aucun sens dans notre réalité climatique, géographique et culturelle.
Nous vivons en zone tropicale. Ici, les saisons ne se divisent pas en printemps, été, automne, hiver. Ce découpage, issu des régions tempérées d’Europe ou d’Amérique du Nord, ne reflète ni notre expérience quotidienne ni notre rapport au climat. Dans la Caraïbe, nous avons deux saisons principales : le Carême (la saison sèche) et l’hivernage (la saison humide). Ce sont ces mots-là qui racontent notre territoire, notre rythme naturel, notre histoire.
Parler « d’été » chez nous, c’est plaquer un imaginaire qui ne nous appartient pas.
C’est aussi oublier que notre chaleur est constante, que notre soleil brille quasiment toute l’année, que notre réalité n’a rien à voir avec les envies de baignade après un long hiver. Ici, on vit dans la lumière, pas dans l’attente.
Ce n’est pas un détail linguistique. C’est une question de regard. Continuer à parler d’« été » dans la Caraïbe, c’est continuer à penser le monde depuis ailleurs, à se définir en fonction d’un centre qui n’est pas le nôtre. C’est reproduire une forme douce mais persistante de décentrage culturel.
Il est temps de reprendre la parole avec nos mots. De parler de Carême et d’hivernage. De célébrer notre climat pour ce qu’il est, pas pour ce qu’il devrait être selon des modèles venus d’ailleurs.
Il est temps, tout simplement, de penser Caraïbe, de parler Caraïbe, de vivre Caraïbe.
Alors non, il n’y a pas d’été dans la Caraïbe. Et c’est très bien ainsi.