L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la Banque interaméricaine de développement (BID) ont publié cette année Caribbean Development Dynamics 2025, un rapport dense et comparatif qui décortique les réalités de 15 pays de la région.
L’objectif ? Éclairer les décideurs mais aussi l’opinion publique sur les défis majeurs de la Caraïbe et les pistes d’action possibles.
Climat : une vulnérabilité qui coûte cher
La Caraïbe est l’une des zones les plus exposées aux chocs climatiques. Ouragans, sécheresses, inondations… entre 2001 et 2020, les événements extrêmes y ont bondi de 85 % par rapport aux décennies précédentes. La facture est lourde : 2,13 % du PIB régional en pertes chaque année. Et pourtant, la contribution de la région aux émissions mondiales reste minime, à peine 0,23 %.
Une biodiversité unique au monde
Près de 10 % des récifs coralliens de la planète, 45 % des espèces de poissons et 25 % des coraux se trouvent dans la région.
Ces richesses, si elles sont protégées, ouvrent la voie à une transition verte : énergies renouvelables, tourisme durable, économie bleue, solutions fondées sur la nature. Un capital écologique inestimable qui pourrait devenir le moteur d’un développement durable.
Progrès sociaux… mais inégalités persistantes
Bonne nouvelle : l’espérance de vie atteint aujourd’hui 72,6 ans, soit quatre ans de plus qu’en 1990. La durée moyenne de scolarisation grimpe à 14,1 années, et le revenu par habitant a bondi de 66 % en trois décennies.
Cependant, la médaille a son revers : un quart de la population vit encore dans la pauvreté, et 37 % subissent une insécurité alimentaire modérée ou sévère. Le travail informel reste massif : 47,2 % des actifs y sont cantonnés, avec des protections sociales très limitées.
Une économie peu diversifiée et endettée
La croissance potentielle reste modeste, autour de 1,4 % par an. L’endettement public est élevé (78,8 % du PIB en moyenne en 2022), limitant les marges de manœuvre. La dépendance au tourisme est criante : avant la pandémie, il représentait un quart du PIB régional. Guyana, Trinidad et Tobago ou encore Suriname misent sur leurs hydrocarbures, mais la majorité des pays restent vulnérables aux chocs externes.
Gouvernance et confiance en berne
La démocratie séduit de moins en moins : en 2023, 65 % des Caribéens exprimaient une faible satisfaction vis-à-vis du système, en forte hausse sur dix ans. La criminalité grève lourdement les économies, représentant 3,7 % du PIB régional. Santé et éducation souffrent également d’un déficit de confiance, même si les attentes restent fortes.
Financement et intégration : deux leviers essentiels
Les recettes fiscales plafonnent à 21 % du PIB, en dessous de l’Amérique latine et loin derrière l’OCDE. Toutefois, la Caraïbe innove : depuis 2019, plus de 1,5 milliard USD d’obligations vertes, sociales ou bleues ont été émises. Côté commerce, la tendance est inquiétante : la part de la région dans les exportations mondiales a reculé à 0,23 %, et le commerce intrarégional ne pèse que 6,7 % du total.
Un avenir à écrire collectivement
Le constat est clair : la Caraïbe possède des atouts exceptionnels mais reste fragile. Le rapport insiste sur trois priorités :
- renforcer la résilience climatique,
- réduire les inégalités sociales,
- et approfondir l’intégration régionale pour peser davantage sur la scène mondiale.
En somme, la Caraïbe est à un carrefour : continuer à subir, ou transformer ses vulnérabilités en leviers de développement.