Je continue ma plongée dans mes archives et je dois vous avouer que je n’avais pas mesuré le nombre d’articles que j’ai rédigés au fil des années. Douze ans de carrière… Cela en fait des écrits !
J’ai retrouvé des pépites que je m’étais toujours promis de mettre en ligne. Parmi celles-ci, l’interview de Grace Bumbry.
C’était en 2003. D’octobre à janvier, j’effectuais un stage de journalisme au sein de la rédaction de France Antilles Guadeloupe, dans le cadre de ma maîtrise de lettres modernes spécialisées. Cela faisait juste quelques semaines que j’étais « en poste » quand la mission m’a été confiée d’interviewer Grace Bumbry, une très célébre cantatrice américaine. Elle devait se produire quelques jours plus tard au Centre des arts à Pointe-à-Pitre pour l’inauguration du neuvième festival de musique classique.
Comme Grace Bumbry n’était pas encore en Guadeloupe, l’interview se déroulait par téléphone. J’étais jeune, étudiante, et je devais m’entretenir en anglais avec cette très grande dame… Je n’en menais pas large !
Cependant, je me souviens encore de sa voix chantante, de sa grande gentillesse. Grâce à notre entretien de quelques minutes sur les temps forts de sa carrière notamment, j’ai pu rédiger un article dont j’étais à l’époque très fière. Maintenant, quand je le lis, je me dis que j’aurais bien sûr pu beaucoup faire mieux.
La voici. Vous me direz ce que vous en pensez.
« J’ai chanté au Trocadéro pour Nelson Mandela »
Pourquoi vous surnomme-t-on la Vénus noire ?
Ce surnom date de mes débuts en Allemagne. En 1961, à l’âge de 24 ans, j’ai été la première personne de couleur noire à tenir le rôle de Vénus au fameux Bayreuth Festspiel haus. Cela a évidemment suscité une controverse, mais j’ai par la suite été acclamée et ce nom de Vénus noire m’est resté.
Vous avez chanté dans les opéras les plus prestigieux de la planète. Quels sont vos souvenirs les plus forts ?
Il y en a tant ! Le premier d’entre eux est certainement Vénus. Il y a aussi mes vrais débuts à Paris, en 1960, dans le rôle de Carmen de Bizet. Et puis, les grandes scènes : Covent Garden à Londres, la Scala de Milan et le Metropolitan, bien sûr.
Vous avez incarné Carmen sous la direction du grand chef d’orchestre Herberts Von Karajan…
Ca a été un moment très important dans ma vie. Déjà quand Karajan m’a choisie pour être Carmen. Tout le monde connaît ce rôle, l’un des plus beaux du répertoire. C’est vraiment très spécial. Le film qui a alors été réalisé a été bien reçu partout. A cette époque, il n’y avait pas beaucoup de chanteurs noirs dans le monde à se produire dans un tel répertoire. Alors c’était vraiment une nouveauté de voir une chanteuse noire tenir un rôle majeur dans un très grand film, avec un très grand chef d’orchestre comme Karajan.
Vous vous êtes souvent produite avec des partenaires tels que Placido Domingo ou encore Montserrat Caballe. L’occasion de moments impérissables ?
C’est toujours merveilleux, toujours un grand plaisir de chanter avec des personnes de ce niveau. Domingo n’était pas encore ce qu’il est devenu, mais j’ai aimé travailler avec lui. J’ai eu de merveilleuses collaborations, et cela, dans le monde entier : Toscal à la Scala, African à Londres, Salvatore au Metropolitan. J’aime travailler à ce niveau-là, car cela me pousse à être encore meilleure. Malheureusement, je n’ai pas beaucoup trvaillé avec Montserrat Caballe. Je le regrette, car cette excellente cantatrice a aussi une incroyables personnalité.
Vous participez à de nombreux événement humanitaires ou même politiques. Vous collaborez même avec l’UNESCO…
Malheureusement, je n’ai plus le temps comme auparavant de me consacrer à l’UNESCO. Je le regrette vraiment beaucoup. Sinon, je garde en mémoire le fait d’avoir chanté sur l’esplanade du Trocadéro à Paris pour Nelson Mandela. Un autre grand moment de ma carrière.
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Une renommée internationale
Née à Saint-Louis (Missouri), Grace Bumbry a pu, grâce à son courage et surtout son talent, franchir toutes les difficultés et devenir la grande cantatrice qu’elle est encore aujourd’hui. Elle fait ses débuts à l’Opéra de Paris, mais c’est bien en Allemagne qu’à 24 ans seulement, elle accède à une renommée internationale comme mezzo-soprano.
Grâcce à son inoubliable rôle de Vénus, elle a été acclamée par la critique. S’ensuivirent des rôles remarquables comme Eboli dans Don Carlos de Verdi, Carmen ou encore Norma de Bellini avec Montserrat Caballe.