Spécial invité : « La Guadeloupe face à la problématique identitaire » vue par Michelle Martineau

Après Malika Danican, une jeune femme que je connais bien, j’ai choisi d’avoir comme invitée du blog une autre Guadeloupéenne, mais que je n’ai jamais rencontrée : Michelle Martineau. Parce que Malika Danican me l’a recommandée. Avec raison.

Arrivée au Canada en 2015, Michelle Martineau effectue un Doctorat en science politique à l’Université de Montréal. Son sujet de thèse : une étude comparée sur les mouvements indépendantistes en Guadeloupe, Martinique et à Trinidad de 1950 à nos jours. Vaste et importante thématique !

Auparavant, toujours à l’Université du Québec A Montréal, elle a obtenu sa maîtrise en science politique en présentant un mémoire dont elle vous exposera le sujet dans le texte qui suit. Elle est aussi titulaire d’une maîtrise en droit public effectuée à l’Université des Antilles.

Son profil m’intéressait déjà, naturellement. Et cela a encore été plus le cas quand, lors de notre premier échange, elle m’a expliqué qu’elle jugeait nécessaire de vulgariser ces pans de notre Histoire.

J’ai donc décidé de lui offrir une page blanche de mon blog. Voici son billet.

Un an et demi après le début de la rédaction de mon mémoire intitulé « Décolonisation et indépendance : le nationalisme et la question identitaire aux Antilles françaises de 1950 à 1990 », il était pour moi nécessaire de parler d’un sujet qui me tient à cœur.

Les commémorations des évènements tragiques de mai 1967 en Guadeloupe, mon île natale, furent l’occasion de découvrir, avec grand émoi, cette période charnière du XXe siècle.

Grâce à mes parents, j’ai pu connaître rapidement le déroulé de ces évènements, mais sans plus. Ce qui me laissa sur ma faim d’ailleurs.

C’est ainsi que je prends la plume pour, à mon tour, délivrer un message au grand public. Un message rempli de convictions, mais aussi d’espoirs.

La question identitaire, au travers des mouvements indépendantistes que nous connaissons tels que le Groupe d’organisation nationale de la Guadeloupe (GONG) ou encore l’Alliance révolutionnaire caraïbe (ARC) et le Groupe de libération armée (GLA), remettait en cause de façon systématique cette appartenance française forcée : on appelle cela l’assimilation.

Des questions simples, mais lourdes de sens se posent : Suis-je Français(e) ? Suis-je Guadeloupéen(ne) ? Ou les deux ? En reprenant Simone de Beauvoir : « On ne nait pas femme, on le devient », l’on pourrait adopter cette même citation : On ne nait pas Français, on le devient. Je m’explique. La France, au cours de ces dernières décennies, et ce, suite à la loi de départementalisation du 19 mars 1946, à établit une politique visant à omettre, par le biais de l’éducation, la véritable histoire des Guadeloupéens.

Certes, pour une tranche de la population, « nos ancêtres les Gaulois » détermine leur identité. Mais il ne faut pas oublier nos ancêtres issus d’Afrique. Il ne faut pas oublier nos racines. Notre culture.

Cette double culture ne doit être perçue comme un fardeau, mais une richesse.

Il ne faut pas omettre la révolution de 1801 où, pour la première fois, la Guadeloupe a connu un gouvernement issu d’hommes de couleur libres. Notre histoire est particulière, riche en évènements, mais malheureusement peu connue du grand public.

Alors, nous, en 2018, nous faisons partie de la France de façon pleine et entière, mais il serait regrettable de mettre de côté nos racines. Il serait regrettable d’oublier le combat de ces milliers d’hommes et de femmes qui ont lutté pour la liberté, cette soif d’émancipation qu’ont reprise les mouvements indépendantistes.

Il ne s’agit pas de faire un plaidoyer en faveur de l’indépendance. Il s’agit ici d’exprimer la nécessité de vulgariser l’histoire de la Guadeloupe, dans son ensemble.

La problématique identitaire ne date pas d’hier, et il paraît essentiel, pour l’avenir de la Guadeloupe de revendiquer cette double identité.

Nous sommes une terre issue de cultures multiples et diverses et c’est ce qui fait notre richesse en tant que Guadeloupéens !

Nous ne devons pas avoir honte. Nous ne devons pas avoir honte de notre histoire, de notre langue maternelle – le créole – et tous ces us et coutumes que nos aïeux nous ont transmis.

La vulgarisation historique est nécessaire ! La vulgarisation de notre culture est nécessaire pour guérir nos maux. Cette vulgarisation est un moyen de se réconcilier avec soi-même et ainsi avancer, proposer de nouveaux projets tant sur le plan politique, économique, social et culturel pour l’avenir de la Guadeloupe.

Notre double culture est une force, utilisons-la !

Michelle Martineau, la tête bien pleine et un talent pour le dessin également. La preuve en images.

Comments

    1. Mylène

      Oui, je trouve aussi. 😉 Michelle Martineau livre un point de vue et des informations que je n’aurais peut-être pas abordés sur ce blog, n’étant pas assez pointue sur le sujet. C’est cela qu’apporte cette rubrique Spécial Invité. Je suis ravie que le texte t’ait plu.

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