A 30 ans, Kevin Oualli, un Guadeloupéen ingénieur, entrepreneur, startuper, innovateur, est en train de concrétiser son rêve. Au sens propre comme au figuré.
Pour vous raconter sa vision, son parcours, son cheminement d’entrepreneur, j’ai décidé de rédiger un billet bien plus long que d’habitude. Une manière de conclure, avec lui, mon année 2017 marquée par une foule de rencontres de personnalités intéressantes, d’entrepreneurs inspirants, de Caribéens dynamiques, qui ont accepté de me faire confiance, de se livrer, afin que je puisse rédiger tous les portraits publiés sur ce blog au fil des mois. J’en profite pour les remercier tous.
Revenons-en à Kevin Oualli.
Côté études, du temps pour « trouver sa voie »
« J’ai perdu mon père lorsque j’avais 13 ans. De cet âge-là à mon baccalauréat, j’étais énervé contre la vie. J’ai fait beaucoup de bêtises et j’ai raté mon bac la première fois que je l’ai passé. Par contre, tous mes amis l’ont eu. Tous !
Ca a été le déclic. Je me suis dit que plus jamais cela m’arriverait. Le fait de tous les voir partir m’a permis de prendre le recul nécessaire pour faire le point avec moi-même et décider de prendre ma vie en main, de me responsabiliser. »
L’année suivante, le jeune homme repasse son baccalauréat en Sciences de l’Ingénieur et l’obtient, cette fois-ci. Evidemment, j’ai envie de préciser, car vous noterez en lisant la suite du billet que quand Kevin Oualli a une idée en tête, il fait tout pour réussir.
Diplôme en poche, le bachelier doit prendre une décision concernant ses études supérieures.
« Comme la plupart des lycéens, je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire après mon bac. Mon père était ingénieur en informatique, je me suis donc naturellement intéressé à ce domaine. Ma mère m’a dit : ‘ça serait bien que tu fasses un DUT (ndlr : Diplôme Universitaire de technologie) télécom. Il y en a un à Toulouse.’
Je ne voulais pas aller tout de suite à Paris pour ne pas être trop décalé par rapport au climat de la Guadeloupe. Toulouse paraissait être une bonne option. J’ai envoyé mon dossier, il a été accepté. Je suis arrivé dans l’Hexagone en 2006. »
Deux ans plus tard, il obtient son DUT en réseaux et télécommunications. Puis, il intègre l’École d’Ingénieur Généraliste en Informatique (Efrei) à Paris. Toutefois, ne croyez pas que ce fut une évidence. Là encore, sa mère a joué un rôle déterminant.
« Après mon DUT, j’avais dans l’idée de valider une licence et de commencer à travailler. J’en ai parlé à ma mère qui m’a répondu : ‘non, va au bout, et tu verras par la suite’. Elle nous a toujours poussé à aller au bout des choses et c’est pour cela que j’ai d’autant plus de respect et d’amour pour elle. Je l’ai écouté. J’ai intégré l’école d’ingénieur en 2008. »
A l’Efrei, il apprend d’intervenants qui avaient beaucoup d’expérience dans leur domaine de compétence. Il effectue aussi un stage technique de quatre mois les premières années, puis un stage de six mois plus orienté projet et management en dernière année. Evidemment, au bout de trois ans, il est diplômé.
« Après mon bac, j’étais une machine de guerre. L’échec n’était pas envisageable. Je n’avais pas droit à l’erreur. »
Une profession choisie par raison
Devenir ingénieur en réseaux et télécommunications, ce n’était pas son rêve. Kevin Oualli est très clair : « je n’ai jamais été passionné par ce que je faisais, mais je savais que tôt ou tard cela me permettrait d’avoir beaucoup de portes ouvertes, de créer mon réseau ». Point de passion donc, mais une réelle détermination.
Durant son stage de fin d’année où il est chargé de mettre en place des solutions réseaux pour différentes filiales, il est si performant que l’entreprise décide de le garder. Evidemment. « J’avais une double casquette : chef de projet et ingénieur réseau. J’ai travaillé avec tous les services de façon transverse. C’était très intéressant. »
En 2011, il devient salarié. En trois ans, il passe de chef de projet à architecte de réseau. « Ce métier me plaisait vraiment parce qu’il comprenait le côté projet, mais surtout davantage de techniques. Pour devenir architecte, j’ai dû effectuer une formation à l’Ecole Télécom SudParis pendant un an. »
Il exerce le métier qu’il souhaitait, et pourtant, au bout de trois ans, Kevin Oualli a envie de changer d’air.
« J’avais fait le tour. Je n’aime pas rester dans ma zone de confort. J’aime prendre des risques, changer d’environnement, rencontrer d’autres personnes. »
Nous sommes en 2014. Il est embauché dans une société plus petite, à taille humaine. Cependant, là encore, il n’y reste qu’un an et demi, parce qu’« il ne s’y sent pas à sa place ».
Entrepreneur, évidemment
« J’ai toujours ressenti que j’étais fait pour autre chose que ce que je faisais au quotidien. Je suis issu d’une famille d’entrepreneurs. Ce côté me titillait tous les jours. Je gagnais bien ma vie, mais il me fallait autre chose. J’ai écouté la petite voix qui me disait d’entreprendre. »
Kevin Oualli s’informe et se forme sur l’entreprenariat, le développement personnel en lisant de nombreux livres. Et c’est ainsi qu’il a un déclic et décide de passer à l’action. En 2015, il crée une plateforme de e-commerce : il achète des produits innovants en Chine qu’il revend au détail en France. « Pour moi, c’était plus un jeu qu’autre chose. Je voyais cela comme un revenu complémentaire. Je ne m’y suis pas lancé à 100%. »
En parallèle, il devient ingénieur réseaux et télécoms indépendant. Il est donc à la tête de sa propre société jusqu’à ce jour. « Cela me permet de gagner plus d’argent pour pouvoir investir dans mes autres entreprises. Voici les portes dont je parlais précédemment. »
Et là, préparez-vous, car le parcours de Kevin Oualli, déjà intéressant, prend un tour TRES suprenant.
Tout en étant salarié puis entrepreneur, le jeune homme travaillait sur un projet qui a débuté durant son sommeil. Vous avez bien lu !
« En 2012, j’ai fait un rêve. Je me voyais avec mon frère en train de manipuler une montre qui avait un design interchangeable. Ce rêve était si précis… Au réveil, je me suis dit que c’était bizarre. Curieux comme je suis, j’ai regardé sur internet si ce système existait. Et ce n’était pas le cas.
Je suis quelqu’un de très spirituel, je crois aux signes de la vie. J’étais jeune, stable financièrement. J’ai donc décidé de me lancer dans ce projet. Je me suis rapproché de professionnels de l’horlogerie pour qu’ils puissent formaliser en schémas 3D ce que j’avais en tête. »
« Quand le designer horloger a réussi à faire la représentation graphique du concept d’interchangeabilité, il m’a dit : ‘pourquoi Swatch n’a pas pensé à ce système-là !’ »
SWATCH ! La grande marque de montre. La plus connue. En entendant ces mots, Kevin Oualli, qui n’y connaissait quasi rien au monde de l’horlogerie, s’est trouvé conforté. Il ne pouvait que continuer. Evidemment.
Avec ses schémas en main, il se rapproche d’un cabinet spécialisé dans la propriété intellectuelle et industrielle afin de pouvoir élaborer une demande de brevet. Il doit utiliser ses économies pour ce faire, mais n’hésite pas. « Nous avons travaillé dessus durant plusieurs mois et j’ai finalement déposé ma demande en 2013. Cela a pris énormément de temps pour que j’obtienne la validation de ce brevet, à cause du processus complexe de vérification. »
20 octobre 2017. Après 4 ans d’attente, il a enfin cette attestation de brevet d’invention ! Une victoire.
« J’ai eu des moments de doute où je me suis dit : Kevin, qu’est-ce que tu es en train de faire ? Cependant, il ne faut rien lâcher. »
A force d’acharnement, du rêve à la concrétisation
« Lorsque tu as un projet, il ne faut jamais abandonner. Je ne connaissais rien à l’horlogerie, mais à force de m’y intéresser, je suis devenu passionné de ce secteur, de ses acteurs. »
« Je souhaite aller au bout de l’exercice. Mon objectif premier est de créer ma marque de montre. »
Kevin Oualli y croit, et il a embarqué son frère dans l’aventure. En septembre dernier, ils sont partis à Hong-Kong rencontrer des fournisseurs et fabricants. Là-bas, durant une semaine, ils ont fait des rencontres décisives, notamment celle avec le délégué général de la Chambre française d’horlogerie. Convaincu par leur dynamisme, ce dernier les a rencontrés par la suite en France. Un soutien de poids, forcément pertinent.
Nom de code : Halchimy
Je ne vous avais pas encore dit le nom de la marque créée par Kevin Oualli. Halchimy. Joli, non ? Ce mot est un clin d’oeil à L’Alchimiste de Paulo Coelho. « L’histoire de ce livre porte sur un jeune berger qui a fait un rêve, où il devait aller chercher son trésor. Et il a fait tout un périple pour le trouver. Je m’y suis reconnu », précise Kevin Oualli.
Quant à la suite des événements pour concrétiser son projet, le startuper y a également mûrement réfléchi. Il a fait une étude de marché pour déterminer quelle serait sa cible. « Je souhaite vendre mes montres entre 300 et 700 euros. Dans ce créneau, il y a beaucoup de concurrence, mais le fait d’avoir innové, d’avoir une valeur ajoutée supplémentaire, cela me donne un avantage certain. »
Désormais, ses prototypes en main, Kevin Oualli va pouvoir démarcher des organismes de financement. Sa startup est en passe de franchir une nouvelle et importante étape.
« Ce n’est même pas pour moi que je le fais, mais pour tous ceux qui souhaitent entreprendre et notamment les entrepreneurs d’Outre-mer. Je veux leur prouver que même en partant d’une feuille blanche, à force de travail, de persévérance et de passion, on arrive à transformer son rêve en réalité. »
– Kevin Oualli, entrepreneur, startuper, créateur d’Halchimy
Comments
Bien Monsieur! Je crois aux rêve. Mais ils tardent à se concrétiser!
Mon inspiration. #monagilFR. Merci Kev!