Cuba face au terrible embargo américain, vestige de la guerre froide

Qui n’a pas entendu parler de l’embargo américain auquel Cuba est soumis depuis des années. Il est en place depuis 1962 ! C’est assurément l’un des plus longs de l’histoire.

J’ai eu envie de vous en parler, après la lecture d’un récent article de La Presse, dont je vous livre deux extraits.

« Cuba a estimé jeudi à plus de cinq milliards de dollars l’impact sur un an de l’embargo américain sur l’économie de l’île, et plaidé pour un allégement des sanctions avant la fin du mandat du président Joe Biden d’ici la fin de l’année. »

« Ce chiffre représente une hausse de près de 190 millions de dollars par rapport à la même période précédente. (…) Il a ajouté que l’impact cumulé sur plus de six décennies atteignait quelque 164 milliards de dollars à prix courant, soit sans tenir compte de l’inflation notamment. »

Des montants colossaux… Il est à noter que le Produit Intérieur Brut de Cuba était estimé à environ 105 milliards de dollars américains en 2023, selon la Banque mondiale.

 

En lisant cet article, il m’est apparu indispensable de rappeler le contexte de cet embargo qui plombe ce pays caribéen.

Un peu d’histoire…

L’embargo économique contre Cuba a officiellement commencé en 1962, mais les tensions entre les États-Unis et le gouvernement de Fidel Castro avaient émergé bien avant. Après la Révolution cubaine de 1959, qui renversa le régime de Batista soutenu par les Américains, Castro nationalisa plusieurs entreprises américaines sur l’île, suscitant la colère de Washington.

En réponse, les États-Unis imposèrent des restrictions commerciales, marquant le début d’un blocus économique qui ne fera que se durcir au fil des décennies. Le contexte géopolitique de l’époque, avec la montée des tensions entre l’Est et l’Ouest, plaça Cuba au centre du conflit idéologique mondial. Son alliance avec l’Union soviétique pendant la guerre froide renforça l’isolement de l’île aux yeux des États-Unis, d’où la décision de John F. Kennedy d’imposer un embargo total sur les échanges économiques avec Cuba.

Conséquences désastreuses et résilience

Dès ses débuts, l’embargo américain a entraîné des pénuries de biens essentiels, restreignant l’accès à des produits de base, des médicaments, des technologies et des pièces détachées. L’économie de l’île, historiquement dépendante des exportations de sucre vers les États-Unis, a dû se redéployer et chercher d’autres partenaires commerciaux, notamment en Union soviétique et plus tard, en Chine et au Venezuela.

Les secteurs de la santé, de l’agriculture, et de l’énergie ont particulièrement souffert, affectant directement le bien-être de la population cubaine. Il est difficile d’obtenir certains médicaments ou équipements médicaux sophistiqués, car ils sont souvent brevetés aux États-Unis.

Face aux restrictions, l’île a fait preuve de résilience, développant des mécanismes alternatifs pour subvenir aux besoins de la population. Le tourisme, notamment, est devenu une source vitale de devises, bien que la pandémie de COVID-19 ait gravement touché ce secteur.

 

Cuba et ses soutiens caribéens, internationaux

L’embargo a profondément influencé les relations diplomatiques de Cuba, notamment avec ses voisins caribéens. La position de l’île comme bastion du socialisme dans la région a créé un fossé avec les nations alignées sur les États-Unis. Cependant, malgré l’isolement américain, Cuba a maintenu des liens solides avec plusieurs pays de la Grande Caraïbe, comme le Venezuela à travers l’initiative Petrocaribe, qui a fourni des ressources énergétiques cruciales en échange de services médicaux cubains.

Cuba continue également de compter sur ses alliances régionales pour contourner les effets du blocus. Ses relations avec la Russie, la Chine, et certains États de la Grande Caraïbe montrent la persistance d’une solidarité régionale et internationale contre un embargo qui est perçu par beaucoup comme obsolète et injuste.

Pour Cuba et ses voisins caribéens, cette réalité rappelle les défis d’une région toujours influencée par des forces extérieures.

A quand la fin ?

L’embargo est régulièrement condamné à l’échelle internationale. Depuis 1992, l’Assemblée générale des Nations Unies adopte chaque année une résolution appelant à la levée du blocus, qui est approuvée par une large majorité des États membres. Seuls les États-Unis et Israël continuent de s’opposer à cette initiative, témoignant de l’isolement croissant de Washington sur la question cubaine.

Ainsi, en 2023, « l’Assemblée générale des Nations Unies a voté à une écrasante majorité contre l’embargo économique et commercial des États-Unis contre Cuba, qui date de 1960 » (article de ONU news).

« Au total, 187 États ont voté pour la résolution, proposée chaque année contre l’embargo depuis 1992. Seuls les États-Unis et Israël ont voté contre ; l’Ukraine s’est abstenue. Le document a ainsi obtenu deux voix de plus cette année qu’en 2022. »

Les récentes décennies ont vu quelques tentatives de rapprochement entre Washington et La Havane. L’administration Obama avait amorcé une détente historique avec Cuba, rétablissant les relations diplomatiques et assouplissant certaines restrictions. Cependant, ces progrès ont été en grande partie inversés sous l’administration Trump, qui a réintroduit des sanctions plus strictes et coupé les avancées réalisées en matière de commerce et de tourisme.

Aujourd’hui, l’avenir de l’embargo demeure incertain. De nombreux acteurs internationaux, y compris des membres de la diaspora cubaine aux États-Unis, appellent à sa levée complète.

 

L’embargo américain, vestige de la guerre froide, est assurément un outil de pression politique, une entrave aux droits humains et au développement économique de Cuba, un réel casse-tête qui perdure. La sempiternelle question reste : quand sera-t-il levé ?

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