Avec Axelle Kaulanjan, la « Caribbean boss lady » en pleine lumière

Avec Axelle Kaulanjan, la « Caribbean boss lady » en pleine lumière

Axelle Kaulanjan, guadeloupéenne, 32 ans, ancienne journaliste devenue consultante internationale en communication politique et gestion de crise. Une excellente communicante. Une grande amie. J’ai eu l’occasion de la citer dans plusieurs de mes billets de blog, sans jamais vraiment raconter le pourquoi du comment de notre amitié.

Axelle, je l’ai rencontrée pour la première fois, il y a quasi une dizaine d’années. Elle était une jeune journaliste, comme moi.

J’ai découvert par la suite que si on exerçait le même métier, nous n’avions pas du tout le même parcours. Alors que j’étais salariée, elle était pigiste et déjà chef d’entreprise. Je ne rêvais que de presse écrite « classique », elle s’était tournée également vers le journalisme web et avait des années de radio derrière elle.

J’ai vite compris que nous aurions toujours des points mineurs de désaccord : elle est passionnée par la philosophie et la politique, tandis que j’ai des mauvais souvenirs scolaires concernant la première, je m’intéresse modérément à la seconde.

Cependant, au fil des ans, nous avons construit une amitié forte, parce que nous avons couvert côte à côte la mobilisation LKP et co-écrit un livre sur le sujet, nous avons régulièrement collaboré dans le cadre de différents projets, nous avons effectué un séjour à Dakar mémorable et avons bien d’autres souvenirs communs…

Surtout, nous partageons cette même passion pour notre région, la Caraïbe, cette même envie de la raconter, cette même soif de voir se concrétiser toutes ses potentialités et réussir ses talents.

Alors, bien sûr, quand Axelle m’a annoncé qu’elle préparait une nouvelle plateforme web nommée Caribbean Boss Lady (CBL), destinée aux femmes caribéennes, je lui ai prêté une oreille attentive.

Toutefois, elle ne m’en a pas tellement dit plus, ne dévoilant que des « bouts » du projet au fil des semaines. Frustration !

Heureusement, le site est désormais en ligne et Axelle, pour se rattraper, a accepté de m’accorder sa première interview sur le sujet. Voici donc « la longue histoire » de CBL, selon ses propres termes, mais condensée par mes soins.

Axelle : « A 23 ans, j’avais déjà eu l’idée de cette platefome. J’avais quatre ans d’entreprenariat derrière moi et je venais de lancer Carib Creole One, le premier site d’information pancaribéen dans la Caraïbe française (ndlr : depuis devenu CaraibCreoleNews).

A l’époque, j’ai rencontré un certain nombre de problématiques en tant qu’entrepreneure jeune et femme. Quand j‘avais rendez-vous avec des partenaires, notamment des banquiers, leur premier réflexe était me demander si mes parents étaient au courant, si j’avais bien réfléchi à mon projet et ils me renvoyaient toujours à une figure masculine. Ce fut ma première frustration.

J’ai aussi dû faire face au sexisme, au « mansplaining », c’est-à-dire le fait que des hommes, sous prétexte que vous êtes une femme, se croient permis de vous expliquer votre travail, votre projet, de façon condescendante.

Au fur et à mesure, durant la première année de Carib Creole One, j’ai développé l’idée d’un magazine dédié aux femmes entrepreneures dans la Caraïbe. Cependant, je me suis heurtée à des freins, notamment les finances, mon réseau qui n’était pas encore bien construit.

Après analyse, je crois surtout qu’en tant que très jeune femme, je ne me sentais pas encore légitime pour parler des femmes entrepreneures, de soulever des problématiques. Cependant, ce projet est toujours resté dans un coin de ma tête. » 

 

Dix ans plus tard, le déclic !

En dix ans, Axelle a accumulé les belles expériences professionnelles. Elle a travaillé en Guadeloupe, à Paris, en Haïti, à Saint-Martin. A des postes à hautes responsabilités, dans la  communication politique, institutionnelle notamment. Cependant, pas question pour elle de se reposer sur ses lauriers, comme le prouve ce nouveau projet né de nouvelles frustrations.

Axelle : « En 2016, j’ai mis mon entreprise de consulting en stand-by, pour me consacrer à un nouveau projet professionnel. Bien sûr, en tant qu’entrepreneure dans l’âme, je me suis retrouvée un peu frustrée dans ce cadre administratif très restreint et politique. Cependant, à mon nouveau poste, j’ai eu la chance d’avoir comme supérieur hiérarchique direct quelqu’un qui connaît et comprend les enjeux de l’empowerment féminin dans la Caraïbe.

Après plus de 10 ans dans le milieu politique, je peux dire qu’il s’agit d’un milieu macho, sexiste, avec beaucoup de mansplaining, même si travailler au service d’une personne qui comprend ma démarche, cela me motive et me donne de bonnes raisons d’espérer que les mentalités peuvent changer. »

Pour autant, Axelle décide de « reprendre (s)es bonnes habitudes, de (s)e remettre en mode entrepreneure et de lancer Caribbean Boss Lady ». Pour ce faire, elle a mené une étude poussée sur la cible à laquelle elle souhaite s’adresser : les femmes caribéennes qui veulent entreprendre des choses, que ce soit au niveau business, associatif, religieux, familial, etc.

« L’idée est que les femmes caribéennes s’assument et s’affirment en tant que leaders, à temps complet. Je veux les inspirer en ce sens, pour qu’elles n’aient pas peur d’entreprendre. »

Pour ce faire, Axelle s’inscrit pleinement dans cette dynamique qui a vu l’émergence de « boss ladies » aux Etats-Unis et en Europe anglosaxone, ces dernières années. « Il y a cette grande tendance du women’s empowerment et d’assertion du leadership féminin, depuis trois, quatre ans, avec des figures comme Sophia Amoruso (ndlr : entrepreneure qui a bâti un empire e-commerce) qui ont investi les réseaux sociaux, internet.

Ce sont des modèles de réussite très forts, car ce sont les premières millenials à avoir utilisé les réseaux sociaux pour être des actrices, créatrices de plus-value, en transformant leurs passions en activités qui rapportent. Grâce à leurs initiatives personnelles, elles se sont affranchies de la problématique « argent » et peuvent désormais être des mentors, accompagner et aider les autres femmes ».

 

A travers les propos d’Axelle, vous aurez sans doute compris les objectifs de sa plateforme.

Cependant, petit résumé : CBL est une « une plateforme d’inspiration et d’empowerment pour les femmes caribéennes leaders et celles qui aspirent à l’être », avec des contenus gratuits en français et (par la suite) en anglais sur le site, des événements à venir, mais aussi des services payants d’accompagnement personnalisé.

Axelle : « Quand j’ai écrit mon « mission et vision statement » (ndlr : manifeste), j’ai dû mener une introspection, revenir sur ma carrière.

Dans ma tête, je croyais être une jeune professionnelle et je me suis rendue compte que je suis une vieille jeune professionnelle.

J’ai proposé mes services à nombre de clients que j’ai aidé à accomplir leurs rêves, leurs projets. Et maintenant, j’ai décidé de recentrer mes activités sur les femmes. C’est une cause qui me tient à coeur. Moi, Axelle, à 18 ans, j’aurais aimé pouvoir bénéficier – à l’époque – de ce que je propose aujourd’hui.

Avec CBL, l’idée est de proposer un concentré de services et d’accompagnements à des femmes qui veulent développer des projets, afin qu’elles puissent s’assumer en tant que leaders sans complexe. »

 

Au fait, Axelle, si tu ne devais citer qu’une Caribéenne source d’inspiration ?

Des femmes caribéennes que j’admire, je pourrai en citer 10, 20, 100… Axelle aussi, bien sûr. Cependant, en guise de conclusion pour l’interview, je lui ai demandé de ne m’en citer qu’une. Sa réponse : Lucette Michaux-Chevry.

Axelle : « Lucette Michaux-Chevry m’a toujours inspiré. Je l’ai rencontrée pour la première fois lorsque j’avais six ans, dans le cadre d’un rendez-vous entre ma mère et elle, et j’étais déjà en admiration devant elle. C’est une femme, qu’on l’aime ou qu’on la déteste, qui mérite le respect pour avoir eu l’audace, « les couilles » que d’autres hommes n’avaient pas en politique. C’est un symbole. Elle a une communication tellement géniale, une personnalité tellement forte, flamboyante, que l’on ne peut ignorer. Il y a un avant et un après Lucette Michaux-Chevry dans la politique en Guadeloupe. Elle possède un leadership naturel, elle sait développer des stratégies. Voilà pourquoi elle est toujours au pouvoir jusqu’à maintenant ! »

Bonne continuation, Axelle !

Etant toi-même une Caribbean Boss Lady, je suis convaincue que tu participeras, avec CBL, aux réussites de nombre de Caribéennes.

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