Grande Caraïbe : Et le projet du super canal du Nicaragua partit en fumée…

C’est l’histoire d’un projet pharaonique avorté. En 2017, je publiais un billet de blog flashback évoquant « la construction contestée du canal du Nicaragua ». Je racontais notamment combien le canal du Nicaragua donnait lieu à une couverture médiatique considérable depuis des mois, pour différentes raisons.

Finalement, alors que nous sommes en 2024, point de Canal du Nicaragua. Le projet a été officiellement suspendu en 2018. Et plus grand monde, si ce n’est personne, n’y croit encore. J’ai trouvé intéressant de revenir sur ce feuilleton peu ordinaire.

 

Au départ, un chantier gigantesque et contesté

Un canal du Nicaragua concurrent du canal du Panama… Pourquoi pas ? Beaucoup y ont cru il y a quelques années.

L’histoire du Canal du Panama débute en 2013. Au mois de juin de cette année-là, la concession pour la construction et l’exploitation du canal est accordée par le gouvernement nicaraguayen à la Hong Kong Nicaragua Canal Development Investment Company, un groupe chinois.

 

Fondée en 2012, HKND est une société privée de développement d’infrastructures enregistrée à Hong Kong et qui appartient à l’homme d’affaires chinois Wang Jing, connu pour être le fondateur et président de :

  • Skyrizon Aviation, une société d’aviation chinoise qui possède des parts dans plusieurs compagnies aériennes, dont Hainan Airlines et Hong Kong Airlines.
  • Beijing Xinwei Technology Group, une entreprise chinoise de télécommunications.

 

Créée dans le but de construire le canal du Nicaragua, HKND a obtenu un permis d’exploitation de 50 ans et voit les choses en grand pour concrétiser le projet du canal du Panama :

  • 41 milliards de dollars d’investissement au minimu
  • Construction envisagée : environ 270 kilomètres de long, 27.6 mètres de profondeur, près de 300 km de voies navigables
  • 5 ans de travaux prévus.

 

Pour ce faire, en 2014, sont menées des études d’impact environnemental et social, et l’année suivante, les travaux de terrassement débutent enfin. Cependant, le démarrage du chantier est loin de plaire aux paysans. Des milliers d’entre eux craignent les expropriations à venir et mènent donc des marches de protestation pour dénoncer le projet. Des associations expriment également de vives inquiétudes concernant l’impact négatif sur l’environnement. Toutes ces protestations entraînent des retards importants.

Des articles complémentaires :

 

Pour HKND, rien ne va plus

À l’époque du lancement des travaux, de gros doutes existaient déjà sur la concrétisation du projet de construction.

« Le coût social et environnemental sera lourd. Le canal, qui ferait se rejoindre les deux océans au lac Nicaragua, menacerait l’équilibre écologique de cette retenue d’eau douce vitale pour le pays. La question du financement reste par ailleurs entière, Wang Jing n’ayant jamais précisé qui viendrait s’associer financièrement à son dessein pharaonique. » – Harold Thibault, « La folie nicaraguayenne de M. Wang prend du retard », Le Monde, 04/12/2015 

 

« Le milliardaire Wang Jing, s’est tout simplement évanoui dans la nature, quelques mois à peine après le lancement du projet. Il faut dire qu’il a perdu 90% de sa fortune suite au krach boursier qu’a connu la Chine à l’été 2015. Depuis, l’investisseur-fantôme est introuvable et laisse derrière lui un chantier à l’arrêt. » – « Le canal de Nicaragua n’aura pas lieu », France Culture, 25/09/2018 

Et donc, en 2018, patatras ! Les travaux de construction du canal du Nicaragua sont suspendus, la plupart de ses employés sont licenciés, en raison de problèmes de financement. En effet, HKND rencontre d’importantes difficultés financières. En 2017, la société avait annoncé avoir levé 8 milliards de dollars pour le projet, mais cet argent n’aurait jamais été versé. Et de toute manière, pour rappel, le chantier nécessitait un budget minimal de 41 milliards de dollars. HKND n’a jamais pas réussi à lever les fonds nécessaires pour construire le canal, estimé à 50 milliards de dollars.

Et en plus, le président de HKND, Wang Jing, a été contraint de démissionner de son poste de président de la China Minsheng Investment Group, l’un des principaux bailleurs de fonds du projet.

Enfin, la Chine a (finalement) préféré le Panama, dont l’agrandissement débuté en 2007 s’est achevé en 2016. Ces travaux ont permis au canal de gérer des navires plus grands et plus nombreux.

Ainsi, se « termine » l’histoire peu ordinaire de la construction du canal du Nicaragua. Et qui sait, dans 10, 20 ans, ce projet refera surface avec d’autres investisseurs, d’autres ambitions…

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