En Guadeloupe, d’un monde à un autre, via deux conférences (volet 1)

Mardi dernier, j’étais au Québec.

Pas physiquement non, même si j’aurais bien voulu tant j’apprécie la Belle province, mais via une conférence sur « Le féminisme made in Québec », organisée par le Centre d’Analyse Géopolitique et Internationale (CAGI), le laboratoire de l’Université des Antilles et de la Guyane (UAG). L’intervenante était une Québécoise, féministe, spécialiste de la question, Rachel Chagnon, professeure et chercheuse au Département des sciences juridiques de la Faculté de science politique et de droit de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).

Avant cette conférence, je possédais quelques vagues connaissances sur le féminisme québécois, puisque j’ai vécu quelque temps à Montréal. Entre les dires de mes professeurs de l’époque, les conversations entre amis et mes lectures sur le sujet, j’avais une vision un peu confuse sur les féministes du Québec. L’exposé clair et instructif, plein de franc-parler, de Rachel Chagnon m’a apporté d’intéressants éclaircissements.

Qu’en ai-je retenu ?

D’abord, un sentiment général : le féminisme au Québec, comme dans le reste du monde, est une « lutte » qui reste d’actualité. Rachel Chagnon a ainsi indiqué que « les femmes forment 50% de la population de la planète », mais que « l’espace public économique et sociale est encore majoritairement occupé par les hommes ». Et cependant, « le féminisme a très mauvais presse. On l’a accusé de vouloir détruire l’humanité ». Or, pour elle, c’est une « idéologie qui tend vers l’universalité » dont le « fond de commerce est la question de l’égalité ».

J’ai aussi retenu une année, 1967, marquée par la tenue de la Commission royale d’enquête sur la condition féminine présidée par une journaliste, Florence Bird, qui a débouché sur 167 recommandations. Au Québec, dans le même temps, une réflexion similaire avait lieu. C’est à partir de cette période que le féminisme au Canada s’est considérablement développé.

Pour Rachel Chagnon, le féminisme au Québec peut être défini « francophone dans un contexte anglo-saxon », dans la mesure où il s’appuie sur une culture, des emprunts aux Français, mais une militance différente, qui est, selon moi, plus populaire est forte.  

Rachel Chagon a d’ailleurs souligné sur le fait que ce féminisme « mis(e) sur la coordination entre les milieux militants et académiques ». Elle en a aussi rappelé les gains principaux : la reconnaissance du droit à l’égalité et la création de la commission des droits de la personne, des mesures en matière d’accès à l’emploi, la reconnaissance du caractère discriminatoire du harcèlement sexuel.

Mais il reste aussi des défis : le fractionnement du mouvement féministe, la représentation politique des femmes, le « backlash » et l’implantation de la gouvernance néolibérale (mouvements anti-féministes), ainsi que le mythe de l’égalité « déjà là », c’est-à-dire le fait de se dire que ce combat féministe n’est plus utile.

Ce dernier point m’a particulièrement interpellé. Lors de mes premières semaines à Montréal, en notant les avancées pour l’égalité hommes/femmes là-bas, j’avoue que j’avais un peu cédé à ce « mythe ». Cependant, dans le cadre de mes études, j’ai eu à me pencher sur les violences faites aux femmes au Québec et mon point de vue a complètement changé, tant cette problématique reste importante dans cette province.

J’ai d’autant plus apprécié la conférence de Rachel Chagnon qu’elle a alimenté ma réflexion sur la condition des femmes dans le monde. C’est un sujet qui me tient à coeur et dont j’ai déjà parlé sur ce blog, via un billet intitulé « Demain en Guadeloupe, toutes « fanm doubout » ou personne ».

Le lendemain de cette conférence, j’étais en Somalie… Mais ça, c’est une autre  histoire, une autre conférence, le volet 2 de ce billet, que je publierai très bientôt.

Billet publié sur mon précédent blog, en 2013. 

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